La blanquette de veau : un classique tout en finesse
Plat emblématique de la cuisine française, la blanquette de veau évoque aussitôt une belle cocotte émaillée mijotant doucement sur le feu, des parfums de crème fraîche, de champignons fondants et de vin blanc sec. C’est une recette à la fois douce et raffinée, à la texture crémeuse, avec des arômes subtils plutôt qu’éclatants. Et c’est justement cette délicatesse qui demande un vin bien choisi pour ne pas écraser le plat, mais le mettre en valeur.
Vous êtes nombreux à me poser cette question : “Henri, on boit quoi avec une blanquette ?” Rassurez-vous, je vous vois venir avec vos interrogations du dimanche midi. Et vous avez bien raison : un mauvais accord peut gâcher un plat, un bon peut sublimer l’ensemble. Alors sortons les verres, les tire-bouchons et un soupçon de bon sens.
Vins blancs : la valeur sûre
Commençons avec l’évidence : un vin blanc. C’est l’accord naturellement le plus recommandé avec la blanquette de veau. Pourquoi ? Parce que le vin blanc vient souligner la rondeur de la sauce, sans entrer en conflit avec la texture onctueuse ni les arômes subtils de la viande. Mais attention, tous les blancs ne font pas l’affaire !
Les blancs de Bourgogne
La Bourgogne est une terre bénie pour les amateurs de chardonnay. Un Meursault ou un Puligny-Montrachet, avec leur opulence mesurée, leur minéralité fine et leurs arômes beurrés, forment un mariage de haut vol avec une blanquette bien faite. Le gras du vin s’accorde merveilleusement avec la sauce crémée, sans l’alourdir. Une association pour impressionner votre beau-père (ou votre belle-mère, ne soyons pas sexistes).
Un vieux chenin de la Loire
Moins attendu, mais souvent bluffant : un Vouvray sec ou un Montlouis. Le chenin, s’il est bien vinifié et d’un certain âge, développe des arômes complexes de fruits mûrs, de cire d’abeille et une acidité salivante qui équilibre parfaitement la richesse du plat. Ce sont des vins qui demandent un peu de curiosité mais qui récompensent toujours ceux qui osent sortir des sentiers battus.
Un joli blanc du Jura
Amateur de sensations un brin oxydatives ? Le Savagnin ouillé (à ne pas confondre avec les vins jaunes !) propose une complexité légèrement noisettée, une acidité tranchante et une structure aérienne. Parfait pour réveiller une blanquette classique et apporter un petit plus, un soupçon d’originalité savamment dosé. En somme, l’accord du gastronome averti.
Et du côté des rouges, vraiment ?
“Henri, j’ai dans ma cave un Saint-Joseph 2018, tu crois que ça passe ?” Patience. Il est vrai qu’on conseille rarement un vin rouge avec la blanquette. Mais tout dépend du rouge. Certains profils peuvent tout à fait convenir… à condition d’avoir la main légère sur le tanin.
Un rouge tannique type Madiran ou Cahors ? À oublier. Il prendrait toute la place. En revanche, un Pinot Noir de Bourgogne ou un Gamay bien vinifié (du Beaujolais par exemple) peut offrir une alternative surprenante pour ceux qui tiennent à leur vin rouge, même avec un plat en sauce blanche. L’idée ici est de jouer la carte du fruité léger et de la finesse.
Privilégiez :
- Un Chinon léger ou un Saumur rouge, sans élevage marqué, avec des tanins fondus.
- Un Pinot Noir d’Alsace, souvent plus léger qu’en Bourgogne, mais au fruité croquant délicieux.
Des blancs et… des bulles ? Et pourquoi pas !
Et si vous osiez un peu de frivolité ? Un champagne blanc de blancs bien structuré peut faire des merveilles, surtout si vous servez une version un peu moderne ou allégée de la blanquette. Les petites bulles viennent réveiller le palais après chaque bouchée, et le chardonnay du champagne (quand il est bien fait) conserve assez de tension et de finesse pour se fondre dans l’ensemble. Surtout si vous servez ce plat lors d’un déjeuner élégant ou d’un dîner festif.
C’est aussi un choix judicieux si votre blanquette fait la part belle aux légumes croquants, à des zestes de citron ou à des variations plus contemporaines de la recette classique.
À éviter absolument
Parce qu’un bon accord, c’est souvent aussi savoir quoi éviter, voici une courte liste noire pour ne pas tomber dans le piège :
- Les rouges puissants : trop de tanins, trop de bois, ils écrasent la blancheur du plat.
- Les blancs trop acides (type sauvignon non mûr) : ils accentuent la crème au lieu de la soutenir.
- Les rosés légers : trop maigres, ils ne tiennent pas la route face à une sauce.
- Les vins très sucrés : ils rompent l’équilibre délicat du plat, sauf si vous faites une version exotique (et là, c’est une autre histoire…)
Un accord sur mesure selon les saisons
La blanquette de veau s’apprécie bien entendu en toute saison, mais selon qu’elle est servie en hiver ou au printemps, l’accord peut évoluer.
En hiver, avec une version bien riche, pensez à un blanc boisé (Meursault, Ladoix, voire un Côtes du Jura). Il réchauffera votre assiette sans déséquilibre.
Au printemps, lorsque la blanquette s’allège, que les carottes nouvelles et les petits pois font leur entrée, un Reuilly ou un Sancerre blanc peut tout à fait convenir. Mais attention à la fraîcheur : évitez ceux trop verts ou stricts.
Et si vous cuisiniez avec le vin que vous servez ?
Un petit conseil de chef : utilisez le même vin pour la cuisson que celui que vous servirez à table. Non seulement cela harmonise les arômes, mais cela donne de la cohérence au plat. Pas besoin d’un grand cru évidemment, mais un vin honnête, bien fait, choisi avec soin.
Ainsi, si vous partez sur un Vouvray sec, servez-en un verre au cuisinier (vous !) et incorporez une louche dans la cocotte. Le résultat est souvent saisissant de justesse.
Un dernier mot entre passionnés
Accorder un vin avec une blanquette de veau, c’est un peu comme choisir le bon accompagnement pour une mélodie envoûtante. Il faut de la délicatesse, de l’attention, et surtout une envie sincère de faire plaisir. À vos hôtes, mais aussi à vous-même — car déguster un plat aussi doux, c’est aussi une affaire personnelle.
N’ayez pas peur de tester, de sortir un peu des sentiers battus. Chaque bouteille a sa personnalité, chaque blanquette sa nuance. Ce sont les rencontres entre les deux qui font la magie du bon accord mets et vins.
Alors, la prochaine fois que la fameuse cocotte sera sur la table, vous saurez quoi ouvrir. Et n’oubliez jamais : le vin parfait est celui que l’on partage.